Pourquoi, pourquoi m'avez vous abandonné? Il fait nuit et le grand vent de la fin de l'hiver souffle. Il siffle dans la cheminée et sous les portes, et m'entoure de froid. Dehors il doit secouer les arbres follement, s'élancer dans les rues, contournant les maisons, et bondir dans les campagnes au dessus des collines et des bruyères mortes. Pourquoi m'avez vous abandonné, mon amie? Les nuages d'un noir de suie mouvementés et soulevés, laissant voir le ciel d'un bleu nocturne, s'étendent au dessus des sombres campagnes. Et tout le ciel abaissé se meut sur la terre. Je vous aime avec mes larmes et je vous donne la douleur de mon coeur. Que m'importe, que vous m'ayez abandonné, ô trop heureuse, trop joyeuse et trop douce! Que m'importe... car si votre amour adoucissait mon coeur ce soir, je ne sentirais pas mon âme épouvantée emportée sur les ailes du vent dans les sombres campagnes.
Quatre Poèmes de Léo Latil
Song Cycle by Darius Milhaud (1892 - 1974)
Translated to:
English — Four Poems of Leo Latil
1. L'abandon
Text Authorship:
- by Léo Latil (1890 - 1915)
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- ENG English (Faith J. Cormier) , "Abandonment", copyright © 2002, (re)printed on this website with kind permission
2. Ma douleur et sa compagne
Quand vous avez laissé dans cette fin du jour les larmes inonder votre visage las, une tempête dans mon coeur s'est levée et je me suis enfui, vous abandonnant à la nuit. Maintenant la vaste mer nocturne déroule ses vagues lentes et lourdes, et fait monter sa plainte grandissante vers le firmament sombre. Où êtes-vous, solitaire qui pleurez dans la nuit? Sur les flots je vois ma douleur qui se lève au devant de moi, si pâle et penchante, et cette autre à ses côtés, sa compagne, si pâle et plus penchée, c'est la douleur de votre coeur, mon amie. Le vent qui souffle de la terre les pousse, et toutes deux cheminent vers cette étoile embrumée qui flotte à l'horizon, si près des flots. Ah! douce nuit!
Text Authorship:
- by Léo Latil (1890 - 1915)
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- ENG English (Faith J. Cormier) , "My pain and its mistress", copyright © 2002, (re)printed on this website with kind permission
3. Le rossignol
Nous sommes aux portes du printemps, voici la merveilleuse nuit si douce appesantie sur les campagnes, ô campagnes qui vous étendez mollement inclinées au devant de moi, soulevées par les collines et cheminant jusqu'au lointain horizon courbe vers les dernières clartés du jour. Nous sommes aux portes du printemps; la terre humide des labours, la jeune herbe de blés, la trèfle, la luzerne et les fleurs endormies exhalent leur parfum. La terre douce, meuble et mouillée, sillonnée par le murmure des eaux, animée par le murmure des eaux et par le chant confus des grillons, s'étend sous le firmament des étoiles. Je suis au milieu des campagnes, arrêté, debout, les yeux fermés pour m'abandonner mieux à la nuit. Mon coeur est animé d'amour. La source de larmes et de prières s'ouvre dans mon coeur. Je voudrais parler et que ma voix s'entende et soit portée comme une chose vivante au dessus du murmure des eaux. Je voudrais chanter l'amour de mon coeur et répéter le nom de mon amie. Mais qui est mon amie, qui est mon amie? Où êtes-vous, merveilleuse et douce qui m'aimerez, vous inclinant devant moi, et qui me donnerez votre coeur pour enrichir le mien et votre douleur? Où êtes-vous? Je ne sais pas le nom de mon amie et je dirai seulement "Amour, ô amour, tristesse amère." Tout cela, la douceur de cette terre chaude et ces étoiles, cette longue nuit calme, c'est le printemps; nous sommes aux portes du printemps, le silence est aussi vaste que la nuit. Maintenant commence à chanter son chant grave et pur le rossignol.
Text Authorship:
- by Léo Latil (1890 - 1915)
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- ENG English (Faith J. Cormier) , "The nightingale", copyright © 2002, (re)printed on this website with kind permission
4. La tourterelle
Ma colombe, ô ma tourterelle, est-ce vous dont j'entends la voix plaintive qui gémit dans les ramaux de ces ormaux qui s'assombrissent? Dans cette fin du jour l'air du soir était caressé par vos ailes, et maintenant, dans l'arbre balancé votre voix chante grave et pure, se mêlant au confus murmure des eaux. Ah! quelles tempêtes et quels orages vous ont emporté dans leur vaste univers mon bel oiseau si fier, conduisant votre course avec celle des grands nuages vagabonds. Qu'il est pure le ciel à son zenith! Se peut-il que les vents calmés vous aient abandonné dans les rameaux de ces grands arbres? Leur feuillage hautain est confus sur le firmament. Que vous vous plaignez tristement! Quelle flèche vous a blessé, mon bel oiseau si doux? C'est ici la vallée de mes larmes. Voici ces tendres coteaux, ces fleurs jamais cueillies, ces rives nébuleuses qui cheminent vers l'horizon. Le soleil a laissé ses rayons dans le ciel, dans un ciel pur où palpite le vol d'autres colombes invisibles. Vous chantez sur cette arbre au pied duquel je pleure. Ma colombe, ô ma tourterelle, demeurez avec moi, dans ma vallée.
Text Authorship:
- by Léo Latil (1890 - 1915)
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- ENG English (Faith J. Cormier) , "The turtledove", copyright © 2002, (re)printed on this website with kind permission