Il est un vieil air populaire Par tous les violons raclé, Aux abois des chiens en colère Par tous les orgues nasillé. Les tabatières à musique L'ont sur leur répertoire inscrit ; Pour les serins il est classique, Et ma grand mère, enfant, l'apprit. Sur cet air, pistons, clarinettes, Dans les bals aux poudreux berceaux, Font sauter commis et grisettes, Et de leurs nids fuir les oiseaux. La guinguette, sous sa tonnelle De houblon et de chèvrefeuil, Fête, en braillant la ritournelle, Le gai dimanche et l'argenteuil. L'aveugle au basson qui pleurniche L'écorche en se trompant de doigts ; La sébile aux dents, son caniche Près de lui le grogne à mi-voix. Et les petits guitaristes, Maigres sous leurs minces tartans, Le glapissent de leurs voix tristes Aux tables des cafés chantants. Paganini, le fantastique, Un soir, comme avec un crochet, A ramassé le thème antique Du bout de son divin archet, Et, brodant la gaze fanée Que l'oripeau rougit encor, Fait sur la phrase dédaignée Courir ses arabesques d'or.
Variations sur "Le Carnaval de Venise"
Song Cycle by Virgilio Mortari (1902 - 1993)
1. Dans la rue  [sung text not yet checked]
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- by Pierre-Jules-Théophile Gautier (1811 - 1872), "Dans la rue", appears in Émaux et Camées, in Variations sur le Carnaval de Venise, no. 1
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Researcher for this text: Emily Ezust [Administrator]2. Sur les lagunes  [sung text not yet checked]
Tra la, tra la, la, la, la laire ! Qui ne connaît pas ce motif ? À nos mamans il a su plaire, Tendre et gai, moqueur et plaintif : L'air du Carnaval de Venise, Sur les canaux jadis chanté Et qu'un soupir de folle brise Dans le ballet a transporté ! Il me semble, quand on le joue, Voir glisser dans son bleu sillon Une gondole avec sa proue Faite en manche de violon. Sur une gamme chromatique, Le sein de perles ruisselant, La Vénus de l'Adriatique Sort de l'eau son corps rose et blanc. Les dômes, sur l'azur des ondes Suivant la phrase au pur contour, S'enflent comme des gorges rondes Que soulève un soupir d'amour. L'esquif aborde et me dépose, Jetant son amarre au pilier, Devant une façade rose, Sur le marbre d'un escalier. Avec ses palais, ses gondoles, Ses mascarades sur la mer, Ses doux chagrins, ses gaîtés folles, Tout Venise vit dans cet air. Une frêle corde qui vibre Refait sur un pizzicato, Comme autrefois joyeuse et libre, La ville de Canaletto !
Text Authorship:
- by Pierre-Jules-Théophile Gautier (1811 - 1872), "Sur les lagunes", appears in Émaux et Camées, in Variations sur le Carnaval de Venise, no. 2
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Researcher for this text: Emily Ezust [Administrator]3. Carnaval  [sung text not yet checked]
Venise pour le bal s'habille. De paillettes tout étoilé, Scintille, fourmille et babille Le carnaval bariolé. Arlequin, nègre par son masque, Serpent par ses mille couleurs, Rosse d'une note fantasque Cassandre son souffre-douleurs. Battant de l'aile avec sa manche, Comme un pingouin sur un écueil, Le blanc Pierrot, par une blanche, Passe la tête et cligne l'œil. Le Docteur bolonais rabâche Avec la basse aux sons traînés ; Polichinelle, qui se fâche, Se trouve une croche pour nez. Heurtant Trivelin qui se mouche Avec un trille extravagant, À Colombine Scaramouche Rend son éventail ou son gant. Sur une cadence se glisse Un domino, ne laissant voir Qu'un malin regard en coulisse Aux paupières de satin noir. Ah ! fine barbe de dentelle, Que fait voler un souffle pur, Cet arpège m'a dit : « C'est elle ! » Malgré tes réseaux, j'en suis sûr, Et j'ai reconnu, rose et fraîche, Sous l'affreux profil de carton, Sa lèvre au fin duvet de pêche Et la mouche de son menton.
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- by Pierre-Jules-Théophile Gautier (1811 - 1872), "Carnaval", appears in Émaux et Camées, in Variations sur le Carnaval de Venise, no. 3
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Researcher for this text: Emily Ezust [Administrator]4. Clair de lune sentimental  [sung text not yet checked]
À travers la folle risée Que Saint-Marc renvoie au Lido, Une gamme monte en fusée, Comme au clair de lune un jet d'eau... À l'air qui jase d'un ton bouffe Et secoue au vent ses grelots, Un regret, ramier qu'on étouffe, Par instants mêle ses sanglots. Au loin, dans la brume sonore, Comme un rêve presque effacé, J'ai revu, pâle et triste encore, Mon vieil amour de l'an passé. Mon âme en pleurs s'est souvenue De l'avril où, guettant au bois La violette à sa venue, Sous l'herbe nous mêlions nos doigts... Cette note de chanterelle, Vibrant comme l'harmonica, C'est la voix enfantine et grêle, Flèche d'argent qui me piqua. Le son en est si faux, si tendre, Si moqueur, si doux, si cruel, Si froid, si brûlant, qu'à l'entendre On ressent un plaisir mortel, Et que mon cœur, comme la voûte Dont l'eau pleure dans un bassin, Laisse tomber goutte par goutte Ses larmes rouges dans mon sein. Jovial et mélancolique, Ah ! vieux thème du carnaval, Où le rire aux larmes réplique, Que ton charme m'a fait de mal !
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- by Pierre-Jules-Théophile Gautier (1811 - 1872), "Clair de lune sentimental", appears in Émaux et Camées, in Variations sur le Carnaval de Venise, no. 4
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