Comme des chevreaux piqués par un taon, Dansent les beautés du Zaboulistan. D'un rose léger sont teintés leurs ongles, Nul ne peut les voir, hormis leur sultan. Aux mains de chacune un sistre résonne ; Sabre au poing, se tient l'eunuque en turban Mais du fleuve pâle où le lys sommeille, Sort le vent nocturne, ainsi qu'un forban. Il s'en va charmer leurs cœurs et leurs lèvres, Sous l'œil du jaloux, malgré le firman. Ô Rêveur, sois fier. Elle a, cette brise, Pris tes vers d'amour pour son talisman.
Mélodies persanes
Song Cycle by Charles Camille Saint-Saëns (1835 - 1921)
Translated to:
English — Persian Songs (Laura Prichard)
1. La Brise
Text Authorship:
- by Armand Renaud (1836 - 1895), "La brise", appears in Les nuits persanes, in 2. Gazals en N, first published 1870
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- ENG English (Laura Prichard) , "The breeze", copyright © 2021, (re)printed on this website with kind permission
Confirmed with Les nuits persanes par Armand Renaud, Paris, Alphonse Lemerre, 1870, pages 37-38.
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2. La splendeur vide
J'ai construit dans mon âme Un merveilleux palais, Plein d'odeurs de cinname, Plein de vagues reflets. Saphir, ambre, émeraude En couvrent les piliers ; En silence il y rôde Des lions familiers. Dans l'ivoire des coupes, Sur les tapis profonds, Des monarques par groupes Y boivent les vins blonds. Isolés comme une île, Les murs s'en vont plongeant Dans la nappe tranquille D'un lac de vif argent. Et tout semble immobile, Et pourtant tout grandit, S'élargit, tache d'huile, Monte et s'approfondit. Et de l'onde muette, Et du palais sans bruit, Un feu qui se projette De plus en plus reluit. Mais, à ce qui m'enchante, Deux choses font défaut : Là-dedans rien ne chante, Le ciel est noir là-haut. Oh ! pour un son de lyre, Oh ! pour le moindre azur, Je laisserais porphyre, Perles fines, or pur. Mais le seul qui les donne, L'amour doux et cruel, M'interdit ma couronne D'harmonie et de ciel. Et plus tout luit, tout monte, Tout devient vaste et beau, Plus la douleur me dompte, Plus je suis un tombeau.
Text Authorship:
- by Armand Renaud (1836 - 1895), "La splendeur vide", appears in Les nuits persanes, in 5. La solitaire, first published 1870
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- ENG English (Laura Prichard) , "Empty splendor", copyright © 2021, (re)printed on this website with kind permission
Confirmed with Les nuits persanes par Armand Renaud, Paris, Alphonse Lemerre, 1870, pages 79-81.
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3. La solitaire
Ô fier jeune homme, ô tueur de gazelles, Cavalier pâle au regard de velours, Sur ton cheval dont les pieds ont des ailes, Emporte-moi vers le ciel des amours. J'ai bien souvent, la nuit, sur ma terrasse, Versé des pleurs en te tendant les bras. Stérile effort ! C'est l'ombre que j'embrasse, Et mes sanglots, tu ne les entends pas. Pourtant le ciel m'a faite ardente et belle, Ma lèvre douce est comme un fruit vermeil ; J'ai dans la voix des chants de colombelle, Sur les cheveux un rayon de soleil. Mais enfermée et couverte de voiles, Dans un palais, je meurs loin du vrai bien. Pourquoi des fleurs et pourquoi des étoiles, Si mon cœur bat et si tu n'en sais rien ? Mon bien-aimé, terribles sont tes armes, Ton long fusil, ta lance, ton poignard, Et, plus que tout, tes yeux aux sombres charmes, Perçant un cœur avec un seul regard. Ô fier jeune homme, ô tueur de gazelles, À leur destin mon sort est ressemblant ; Sur ton cheval dont les pieds ont des ailes, Joins mon cœur triste à ton butin sanglant.
Text Authorship:
- by Armand Renaud (1836 - 1895), "Mélancolie", appears in Les nuits persanes, in 5. La solitaire, first published 1870
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- ENG English (Laura Prichard) , copyright © 2021, (re)printed on this website with kind permission
4. Sabre en main
J'ai mis à mon cheval sa bride, Sa bride et sa selle d'or ; Tous les deux, par le monde aride, Nous allons prendre l'essor. J'ai le cœur froid, l'œil sans vertige. Je n'aime et je ne crains rien. Au fourreau, mon sabre s'afflige. Qu'il sorte et qu'il frappe bien ! Le turban autour de la tête, Sur mon dos le manteau blanc, Je veux m'en aller à la fête Où la mort danse en hurlant ; Où, la nuit, on brûle les villes, Tandis que l'habitant dort, Où, pour les multitudes viles, On est grand quand on est fort. Je veux qu'à mon nom les monarques Tiennent leur tête à deux mains, Que mon sabre enlève les marques Du joug au front des humains. Je veux que l'essaim de mes tentes, De mes chevaux aux longs crins, Que mes bannières éclatantes, Mes piques, mes tambourins Soient sans nombre comme la horde Des mouches, quand il fait chaud, Qu'à mes pieds l'univers se torde, Comprenant le peu qu'il vaut !
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- by Armand Renaud (1836 - 1895), "Sabre en main", appears in Les nuits persanes, in 7. Fleurs de sang, first published 1870
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- ENG English (Laura Prichard) , "Saber in hand", copyright © 2021, (re)printed on this website with kind permission
Confirmed with Les nuits persanes par Armand Renaud, Paris, Alphonse Lemerre, 1870, pages 117-118.
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5. Au cimetière
Assis sur cette blanche tombe Ouvrons notre cœur ! Du marbre, sous la nuit qui tombe, Le charme est vainqueur. Au murmure de nos paroles, Le mort vibrera ; Nous effeuillerons des corolles Sur son Sahara. S'il eut, avant sa dernière heure, L'amour de quelqu'un, Il croira, du passé qu'il pleure, Sentir le parfum. S'il vécut, sans avoir envie D'un cœur pour le sien, Il dira : J'ai perdu ma vie, N'ayant aimé rien. Toi, tu feras sonner, ma belle, Tes ornements d'or, Pour que mon désir ouvre l'aile Quand l'oiseau s'endort. Et sans nous tourmenter des choses Pour mourir après, Nous dirons : Aujourd'hui les roses, Demain les cyprès !
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- by Armand Renaud (1836 - 1895), "Au cimitière", appears in Les nuits persanes, in 6. La vallée de l'union, first published 1870
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- ENG English (Laura Prichard) , "At the cemetery", copyright © 2021, (re)printed on this website with kind permission
6. Tournoiement
Subtitle: Songe d'opium
Sans que nulle part je séjourne, Sur la pointe du gros orteil, Je tourne, je tourne, je tourne, À la feuille morte pareil ; Comme à l'instant où l'on trépasse, La terre, l'océan, l'espace, Devant mes yeux troublés tout passe, Jetant une même lueur ; Et ce mouvement circulaire, Toujours, toujours je l'accélère, Sans plaisir comme sans colère, Frissonnant malgré ma sueur. Dans les antres où l'eau s'enfourne, Sur les inaccessibles rocs, Je tourne, je tourne, je tourne, Sans le moindre souci des chocs. Dans les forêts, sur les rivages; À travers les bêtes sauvages, Et leurs émules en ravages, Les soldats qui vont sabre au poing, Au milieu des marchés d'esclaves, Au bord des volcans pleins de laves, Chez les Mogols et chez les Slaves, De tourner je ne cesse point. Soumis aux lois que rien n'ajourne, Aux lois que suit l'astre en son vol, Je tourne, je tourne, je tourne ; Mes pieds ne touchent plus le sol. Je monte au firmament nocturne ; Devant la lune taciturne, Devant Jupiter et Saturne, Je passe avec un sifflement, Et je franchis le Capricorne, Et je m'abîme au gouffre morne De la nuit complète et sans borne Où je tourne éternellement.
Text Authorship:
- by Armand Renaud (1836 - 1895), "Tournoiement", appears in Les nuits persanes, in 10. Songes d'opium, , first published 1870
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- ENG English (Laura Prichard) , "Inebriation", subtitle: "Opium dream", copyright © 2021, (re)printed on this website with kind permission
Confirmed with Les nuits persanes par Armand Renaud, Paris, Alphonse Lemerre, 1870, pages 189-191.
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